L’exposition Botticelli, artiste et designer au musée Jacquemart André à Paris

(Du 10 septembre 2021 au 24 janvier 2022)

Il s’agit d’une exposition monographique sur Botticelli, retraçant son itinéraire de manière chronologique. En effet, Alessandro Filipepi dit Botticelli (vers 1445-1510) est considéré aujourd’hui comme l’un des artistes les plus connus et renommés de la Renaissance italienne du quattrocento. En développant une manière propre et en s’appuyant sur sa pratique du dessin, qui a une place de premier plan dans son œuvre, il a su développer un véritable génie en répondant aux commandes qu’on lui passait.

L’exposition s’organise en huit salles. Je vais tenter de résumer brièvement l’idée générale de chaque salle pour vous donner un aperçu global.

  1. De l’atelier de Filippo Lippi à l’indépendance

Dans cette salle, les œuvres de Filippo Lippi sont mises en regard avec celles de Botticelli (notamment La Lippina de Lippi, vers 1465, Florence, galerie des Offices et La Vierge à l’Enfant avec un ange de Botticelli, 1465-1467, Florence, Hôpital des Innocents) pour comparer et capter l’influence du maître sur l’artiste. En effet, Botticelli intègre l’atelier de Lippi vers 1459-1460. Beaucoup de Vierges à l’Enfant sont peintes, sujet de prédilection durant la Renaissance.

Vers 1467, Botticelli ouvre son atelier à Florence, au rez-de-chaussée de la demeure de son père située via Nuova d’Ognissanto (aujourd’hui via del Porcellana). Il développe un style plus personnel que l’on peut voir dans La Madone au livre (vers 1480-1481, Milan, musée Poldi Pezzoli). Florence est une ville où les productions artistiques fusent et de nombreux échanges ont lieu entre ateliers.

  1. Peintre d’histoires

Botticelli ne peint pas uniquement des Vierges à l’Enfant, il peint également des « peintures d’histoire » pour les demeures des grands patriciens florentins. Au sein de l’atelier de l’artiste, les rôles sont répartis entre le capobottega (chef d’atelier) qui conçoit la composition et ses collaborateurs qui exécutent l’idée de l’artiste en appliquant les couches picturales sur le support et parfois en reportant le dessin préparatoire. Filippino Lippi, le fils de Filippo Lippi, ancien maître de Botticelli, acquiert un rôle de premier plan dans l’atelier de Botticelli notamment dans les Scènes de l’histoire d’Esther (vers 1475).

Dans les ateliers, on pratiquait également l’exercice de la copie, qui permettait une diffusion plus large d’iconographies très prisées à cette époque, comme le Retour de Judith à Béthulie (vers 1470, Florence, galerie des Offices).

  1. L’atelier polyvalent

A partir de du début des années 1470, Botticelli ne déploie pas son art uniquement à travers la peinture mais aussi à travers les arts appliqués. Sa formation d’orfèvre lui permet de transposer ses dessins à différentes techniques artistiques, supervisant la conception de tapisseries et marqueteries. Par exemple, la figure de Minerve, déesse de la guerre, de la sagesse et des arts est très appréciée des Médicis et donc transposée sur différents matériaux et selon différentes techniques. Par exemple, sur la porte marquetée du Palazzo Ducale d’Urbino.

  1. Botticelli et les Médicis

Botticelli reçoit beaucoup de commandes de la part de ma famille des Médicis, riches banquiers soutenant l’émulation artistique, qui reconnaissent le style et la manière de l’artiste. Dans ce contexte, Botticelli réalise des portraits pour les Médicis, notamment celui de Julien de Médicis (vers 1478-1480, Berlin, Gemäldegalderie), commémorant son assassinat en 1478.

Dans ce contexte où la pensée et l’humanisme dominent les préoccupations, Botticelli possède un intérêt marqué pour la Divine Comédie de Dante Alighieri (écrite entre 1303 et 1321), coïncidant avec les humanistes proches du cercle des Médicis. Il reçoit deux commandes : l’une pour impression de la première édition illustrée du poème (1472) pour laquelle il aurait fourni une série de dessins, et l’autre pour un cycle inachevé de 92 dessins, dont la destination reste encore inconnue. Ses dessins témoignent de sa maîtrise parfaite du trait et de la forme.

  1. Vénus, le mythe humaniste

A partir de 1470, Botticelli entre dans une période de création intense qui s’inscrit dans un contexte de philosophie humaniste et de redécouverte de l’antiquité, notamment à travers La Naissance de Vénus (vers 1484-1485, Florence, galerie des Offices), témoignage d’une pensée néo-platonicienne s’appuyant sur les théories du poète et philosophe Marsile Ficin.

Réemployant les mêmes motifs, il reprend la figure de Vénus pour en renouveler la représentation et répondre aux commandes de sa clientèle. On trouvait ce genre de représentations dans les grandes demeures patriciennes. Il réalise également des portraits « allégoriques » comme le Portrait dit de la Belle Simonnetta (1480-1485, Francfort, musée Städel)

  1. Botticelli illustrateur

Le dessin occupe une place centrale dans la carrière de l’artiste. Il acquiert cette maîtrise lors de sa première formation auprès d’un orfèvre, puis perpétue cette pratique qui a eu un rôle central dans son art et au sein de son atelier comme en témoigne son illustration de la Divine Comédie.

  1. La peinture religieuse, du tondo au retable

Les peintures de format rond appelées tondi sont très en vogue à Florence dans la deuxième moitié du XVe siècle. Botticelli excelle dans ce format, par le choix des compositions et les jeux de perspective. Les sujets sont principalement religieux et destinés à la sphère privée. Le recours aux livres de modèles et aux cartons lui permet de déléguer à ses assistants l’exécution du tableau en se réservant la conception seule. C’est pourquoi on le qualifie de designer, au sens moderne du terme, puisque c’est l’invention, toujours renouvelée, qui est au cœur de son œuvre (cf. Sandro Botticelli, La Vierge du Magnificat, vers 1490, Florence, galerie des Offices).

Le retable joue également un rôle fondamental. Placé au-dessus de l’autel d’une église ou d’une chapelle, il fait partie des commandes les plus prestigieuses qu’un artiste puisse recevoir. Par sa visibilité, il assure la diffusion du style et des inventions de l’artiste et permet de susciter l’engouement de potentiels nouveaux clients.

  1. La dernière manière, une esthétique savonarolienne ?

A la fin des années 1480, le pouvoir est ébranlé par l’audience croissance du moine Savonarole, dont les sermons apocalyptiques ont une violente incidence sur la population florentine. On ne sait pas si Botticelli a adhéré au mouvement savonarolien mais on sait que cela a eu une incidence sur son œuvre qui traduit un réel questionnement esthétique. En effet, les formes se tassent, les beautés deviennent plus pudiques, les compositions renouent avec une hiérarchie. Les dernières années de l’artistes sont marquées par une emprise plus grande de l’atelier qui contribue à perpétuer la manière du maître affaibli.

Mon avis sur l’exposition :

Les points négatifs :

  • Il y avait beaucoup de monde, ce qui est dommage car l’exposition est moins profitable, on a moins de temps pour regarder les œuvres.
  • La luminosité était malheureusement trop sombre dans certaines salles, ce qui ne mettait pas en valeur les œuvres et souvent, des reflets venaient altérer la contemplation.
  • L’aspect « designer » a été pour ma part assez mal compris et nécessitait probablement plus de développements en ce qui concerne la définition du terme. Est-ce l’importance des dessins ou la création toujours renouvelée qui est sous-entendue ? Ce terme, qui était pourtant dans le titre de l’exposition n’a été traité qu’en relief, ce qui est regrettable.
  • L’exposition est payante pour les 18-25 ans, ce qui est dommage car cela s’adresse donc à un public ayant les moyens d’acheter leur billet, et inscrit cette exposition dans une logique élitiste de la culture.

Les points positifs :

  • Les cartels étaient très bien écrits et expliquaient bien les œuvres. Un bon point positif car malgré l’affluence de l’exposition, quand on arrive à lire les cartels, on comprend vraiment l’itinéraire de l’artiste et son importance de premier plan.
  • Les œuvres exposées sont d’une grande qualité, si vous aimez Botticelli vous allez vraiment apprécier. Big up au Portrait de la Belle Simonneta que je rêvais de voir en vrai !

 

NB : Je me suis inspirée du livret de l’exposition pour écrire ce texte.

N’hésitez pas à me dire ce que vous avez pensé de cet article, bisous !

 

 

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